Et si l’intelligence artificielle pouvait éradiquer les crimes grâce à un système de prédiction ? On pourrait croire au synopsis de Minority Report¹. Et pourtant, c’est ce qu’envisage de mettre en place le gouvernement Argentin.
Dans cet article, découvrons comment le gouvernement argentin appréhende l’IA au service de la sécurité, ainsi que les questions éthiques qui en découlent.
Ce scénario est-il envisageable dans nos pays européens ? La loi sur l’IA, mise en vigueur par l’Union européenne en août 2024, nous donne des éléments de réponses.
Minority Report : Une fiction qui devient réalité ?
Le 26 juillet 2024, le Gouvernement argentin annonce mettre en place une unité d’intelligence artificielle appliquée à la sécurité. « Elle a pour mission la prévention, la détection, l’investigation et la poursuite de la criminalité et de ses connexions grâce à l’utilisation de l’intelligence artificielle. »²
En utilisant les données biométriques³ et la reconnaissance faciale, l’Argentine prévoit d’intégrer l’IA au cœur de sa stratégie de sécurité.
Ils soutiennent leur décision en citant plusieurs nations utilisant déjà l’intelligence artificielle au sein de leur gouvernement et de leurs forces de sécurité : les États-Unis, la Chine, le Royaume-Uni, Israël, la France, Singapour, et l’Inde.
Sherlock Holmes n’a qu’à bien se tenir, car l’intelligence artificielle pourrait bien devenir sa rivale. Web, Dark web, drones, caméras de surveillance : l’IA traquera le crime derrière les écrans comme dans les rues.
Elle sera capable de détecter les cybermenaces avant que les attaques ne se produisent, ou encore des transactions financières suspectes ou des comportements anormaux qui pourraient indiquer des activités illégales.
Sa capacité d’analyse des données lui donnera un avantage considérable pour déceler des comportements à risques. Ses algorithmes d’apprentissage automatique permettront d’analyser les données historiques de la criminalité, de prédire les crimes futurs afin d’aider à les prévenir.
En traitant de grandes quantités de données provenant de diverses sources, elle pourra en extraire des informations utiles, créer des profils de suspects et identifier des liens entre différentes affaires.
Elle permettra une meilleure communication et coordination entre les différentes forces de l’ordre et de sécurité fédérales et pourra exécuter des tâches dangereuses, telles que la neutralisation des explosifs et munitions, par des robots.
À quoi s’attendre en Europe ?
Comme l’affirme CBS News, « les groupes de défense des droits de l’homme craignent que les nouvelles mesures ne portent atteinte à la liberté d’expression, car les membres du public pourraient s’autocensurer de peur que leurs messages sur les médias sociaux ne soient surveillés par le gouvernement. » ⁴
Ce système pourrait-il se démocratiser en Europe ? La nouvelle loi sur l’IA mise en vigueur le 1ᵉʳ août 2024 par le Parlement Européen nous donne plus d’informations à ce sujet.
Cette loi vise à délimiter des restrictions autour des développements et de l’utilisation de l’IA en UE. La loi définit quatre niveaux de risques des applications IA :
- risque inacceptable : scoring social, répression via les données biométriques, police prédictive (au revoir Minority Report¹ !) ;
- haut risque : systèmes biométriques, recrutement ;
- risque spécifique en matière de transparence : chatbot et génération de contenu ;
- risque minimal : tous les autres systèmes d’IA
L’article 5 du chapitre II explicite notamment des pratiques interdites en matière d’IA, comme l’utilisation d’IA manipulatrices, dédiées à imiter des comportements ou à exploiter des vulnérabilités de personnes et de groupes, ou encore à prédire le risque de fraude d’une personne.
D’autres applications sont considérées à haut risque, comme l’utilisation de l’IA en tant que composant de sécurité d’une infrastructure critique, les systèmes d’identification biométrique à distance ou encore l’IA pour le recrutement.
La loi sur l’IA étant assez dense, un explorateur⁵ ainsi qu’un vérificateur⁶ sont mis à disposition pour s’assurer de la conformité de l’utilisation de l’IA au sein d’une société.
L’Europe choisit la prudence
Alors que certains pays comme l’Argentine explorent des mesures radicales en matière d’intelligence artificielle pour la sécurité, l’Europe trace un chemin plus prudent, guidée par des principes éthiques stricts. La nouvelle législation européenne marque une étape cruciale dans la régulation de l’IA, en veillant à ce que ces technologies soient déployées de manière responsable et respectueuse des droits fondamentaux.
En attendant, Tom Cruise et son monde de prédiction criminelle restent confinés à l’écran, tandis que nous continuons à naviguer avec précaution dans cette nouvelle ère technologique.
# Ressources
¹ Steven Spielberg, Amblin Entertainment, 20th Century Studios, Cruise/Wagner Productions, DreamWorks SKG, Blue Tulip Productions, Digital Image Associates, Blue Tulip, Minority Report « Film » https://www.youtube.com/watch?app=desktop&v=mdhaZ7cJAx8
² Boletín Oficial de la República Argentina, MINISTERIO DE SEGURIDAD, Resolución 710/2024, RESOL-2024-710-APN-MSG [26/07/2024] https://www.boletinoficial.gob.ar/detalleAviso/primera/311381/20240729
³ Données biométriques : « Caractéristique physique ou biologique permettant d’identifier une personne (ADN, contour de la main, empreintes digitales…). »
CNIL https://www.cnil.fr/fr/definition/donnee-biometrique
⁴ Argentina plans to use AI to « predict future crimes and help prevent them », April Alexander, 01/08/2024, CBS News https://www.cbsnews.com/news/argentina-plans-to-use-ai-to-predict-future-crimes-and-help-prevent-them/?utm_source=aibreakfast.beehiiv.com&utm_medium=newsletter&utm_campaign=early-testing-of-apple-s-ai&_bhlid=dc865fea15abbd6e7050d6f49939933912bcb8c7
⁵ EU Artificial Intelligence Act, L’explorateur de la loi sur l’IA https://artificialintelligenceact.eu/fr/ai-act-explorer/
⁶ EU Artificial Intelligence Act, Vérification de la conformité à la loi européenne sur l’IA
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